“Il n’est pas parti paisiblement” : Elise, la fille de Jacques Martin, partage ses derniers mots avant son décès.
En 2007, Jacques Martin était emporté par un cancer généralisé. Dans les colonnes de Gala, sa fille Elise s’est souvenue des derniers mois compliqués qu’a vécu le célèbre animateur.
Cela fait déjà 15 ans que Jacques Martin nous a quittés. Le 14 septembre 1997, l’animateur star a été emporté par un cancer généralisé qu’il aura combattu pendant des années. Comme pour Jacques Martin, cette bataille acharnée a beaucoup marqué ses enfants, et notamment sa fille Elise. Dans les colonnes de Gala ce jeudi 21 avril, elle s’est souvenue avec beaucoup de peine des derniers mois de son célèbre papa, d’abord victime d’un “AVC dont il ne s’est jamais vraiment remis”. Après cet accident vasculaire cérébral, Jacques Martin a été atteint d’un cancer qui s’est vite “métastasé” mais donc il “ne parlait jamais directement”. “A la toute fin, il ne voulait plus voir personne. Comme un animal blessé, il s’est terré dans un coin et s’est caché de tous”, a ajouté la fille de l’animateur du Petit Raporteur.
“Est-ce qu’il avait peur de la mort ? Je n’en sais rien, a confié Elise Martin à nos confrères. Ce qui est très étonnant, c’est qu’après avoir totalement rejeté la religion, suite à ses années de calvaire chez les jésuites, les derniers temps, il avait une Bible ouverte dans sa chambre, à côté de lui, et il aimait qu’on lui en lise des passages.” Gravement malade, Jacques Martin s’est alors tourné vers la religion et sa famille. “Il était tellement pudique… J’ai réussi cependant à avoir des moments de conversation avec lui et j’en suis très heureuse aujourd’hui”, a raconté Elise Martin. Ensemble, le père et la fille ont refait le monde et ont eu des discussions profondes. “On a évoqué notamment le fait que l’on avait eu des vies parallèles, que nos routes ne s’étaient pas vraiment croisées, s’est-elle souvenue. J’ai toujours beaucoup souffert de son absence et, très sincèrement, je dirais que ce qui nous unit le plus, nous ses huit enfants, c’est l’absence de notre père.”
Jacques Martin est “mort triste”
“C’est terrible de dire ça mais c’est à partir du moment où il est tombé malade qu’il est devenu accessible. Disponible. Mais je pense malheureusement qu’il n’est pas parti serein…”, a conclu la fille de Jacques Martin. A la fin de sa vie, l’animateur vedette avait perdu la plupart de ses amis, comme l’expliquait sa dernière compagne à Paris Match. “Le téléphone ne sonnait presque plus. Jacques ne s’en étonnait pas. Son isolement était volontaire. Son monde, c’était sa maladie, résumait Céline Martin à nos confrères. Je voulais faire venir des amis, il freinait des quatre fers.” Selon son ami Pierre Bonte, Jacques Martin est “mort triste” : “Il était humilié : physiquement, il était diminué et souffrait de se montrer comme ça. Il ne voulait plus voir personne”.
Jacques Martin : un génie de la télévision derrière un voile de solitude
Lorsque l’on évoque Jacques Martin, ce sont des images de rires, de musique et de télévision populaire qui reviennent en mémoire. De L’École des fans au Petit Rapporteur, il a marqué de plusieurs générations de téléspectateurs par son humour, son esprit incisif et sa capacité à révéler de jeunes talents. Pourtant, derrière le rideau de strass et de projecteurs, l’homme menait une existence plus trouble, tiraillée entre ses succès publics et ses échecs personnels.
Élise, sa fille aînée, l’a rappelé dans son entretien accordé à Gala. Pour elle, son père était à la fois une figure immense et une présence fuyante. « Nous avons vécu des vies parallèles », dit-elle avec amertume. Ces mots traduisent bien le paradoxe d’un homme adulé par des millions de Français mais absent de la vie de ses propres enfants. Avec ses huit descendants, il a laissé plus de blessures que de souvenirs heureux.
L’ombre de la maladie et l’effondrement
Le basculement survient en 1998 avec cet AVC qui l’affaiblit considérablement. Lui qui avait bâti son image d’homme plein d’esprit, d’éloquence et de verve, se retrouve diminué, entravé dans sa liberté et sa vitalité. À cela s’ajoute quelques années plus tard un cancer généralisé, contre lequel il se bat avec dignité mais aussi avec silence.
Pour sa famille, cette épreuve fut double : voir le patriarche souffrir mais aussi sentir la distance qu’il imposait. Comme un fauve blessé, il préférait l’isolement à la compassion. Sa dernière compagne Céline Martin l’a confirmé : « Jacques freinait des quatre fers quand je voulais inviter des amis. Il ne voulait pas que l’on voie sa faiblesse. »
C’est dans ce contexte que sa fille Élise a pu renouer un fil fragile avec lui. Dans l’intimité des derniers mois, elle a partagé avec son père des discussions profondes, parfois inattendues. L’homme pudique, autrefois réfractaire à la religion, acceptait qu’on lui lise la Bible. « Cela m’a surprise, mais je crois qu’il cherchait une forme d’apaisement », confie-t-elle.
Un héritage en clair-obscur
À la télévision, Jacques Martin aura façonné un pan entier du divertissement français. Ses émissions, à la fois impertinentes et populaires, ont révélé des personnalités comme Pierre Desproges, Laurent Ruquier ou encore Laurent Gerra. Son style, mélange de sérieux et de fantaisie, reste inimitable. Pourtant, du côté privé, le tableau est plus sombre.
Ses enfants, aujourd’hui adultes, gardent le souvenir d’un père lointain. Élise va jusqu’à dire : « Ce qui nous unit le plus, nous ses huit enfants, c’est son absence. » Une phrase brutale qui illustre les cicatrices laissées par cet homme déchiré entre son art et sa vie intime.
Son ami Pierre Bonte résume avec une lucidité douloureuse : « Il est mort triste. Il était humilié par la maladie. » Jacques Martin, qui avait tant donné au public, n’a pas eu droit à une fin entourée d’affection et de chaleur. Le silence de son téléphone, la raréfaction des visites, tout cela a contribué à renforcer le sentiment d’abandon et de solitude.
La leçon d’une vie
Si l’histoire de Jacques Martin fascine encore aujourd’hui, c’est parce qu’elle contient à la fois la grandeur et la fragilité humaine. Derrière le présentateur charismatique se cachait un homme meurtri, qui a dû affronter seul sa déchéance physique. Mais aussi un père maladroit, incapable de donner à ses enfants ce qu’il offrait si généreusement au public : de l’attention, de l’écoute et du rire.
Pour Élise et ses frères et sœurs, il reste des blessures, mais aussi une part de fierté. Celle d’avoir porté le nom d’un homme qui, malgré ses failles, a marqué durablement l’histoire de la télévision française.
Quinze ans après sa disparition, le souvenir de Jacques Martin demeure ainsi contrasté. Entre la lumière des plateaux et l’ombre des chambres d’hôpital, entre l’éclat des rires et la douleur du silence, il incarne ce paradoxe éternel : celui des artistes qui donnent tout à leur public, mais peinent à se livrer aux leurs.