Léa Salamé au 20 Heures : un pari audacieux qui surprend David Pujadas

Le monde de l’audiovisuel français s’apprête à vivre un tournant inattendu. À compter du 25 août 2025, Léa Salamé prendra les commandes du journal de 20 Heures de France 2, succédant ainsi à une longue lignée de présentateurs ayant marqué l’histoire de la chaîne. L’annonce, officialisée cet été, a créé la surprise — et pas seulement parmi les téléspectateurs. Même David Pujadas, figure emblématique du JT de France 2 pendant seize ans, a exprimé son étonnement face à ce choix, saluant le courage de sa consœur tout en pointant les défis qui l’attendent.

Une décision mûrement réfléchie… mais inattendue

Léa Salamé, connue pour son style incisif et sa capacité à mener des interviews sans concession, a bâti sa réputation à travers les débats politiques, les grands entretiens et les émissions de société. Présenter le 20 Heures n’était pourtant pas, jusqu’ici, dans ses projets. Elle l’avait même affirmé à plusieurs reprises : ce format ultra grand public ne faisait pas partie de ses ambitions.

Mais c’était sans compter sur Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, qui a su trouver les mots justes pour la convaincre. Dans La Tribune Dimanche, la journaliste a confié :

« Elle a eu des arguments très forts et en a appelé à ma responsabilité en cette période chaotique. Dans ce monde fracturé, marqué par les guerres et les souffrances, elle s’est dit qu’il y avait dans mon parcours de vie et de femme quelque chose qui me permettrait de raconter peut-être l’actualité différemment. »

Touchée par cette vision, Salamé a fini par accepter de relever ce défi inédit. Dans dix jours, elle fera donc son entrée dans le cercle restreint des présentateurs du JT de 20 Heures, une vitrine médiatique qui touche chaque soir plusieurs millions de téléspectateurs.

L’étonnement — et l’admiration — de David Pujadas

Pour David Pujadas, qui détient le record de longévité à ce poste sur France 2, la nouvelle a de quoi surprendre. Interrogé par Gala ce jeudi 14 août 2025, il n’a pas caché son étonnement :

« Je lui dis “chapeau” car elle n’en avait pas besoin. Léa est une star, et il n’y en a pas énormément. Sa réputation est faite, sa vie professionnelle largement accomplie. »

L’ancien présentateur rappelle que Salamé avait toujours assuré ne pas vouloir s’aventurer sur ce terrain. Ce revirement, selon lui, témoigne d’une prise de risque considérable :

« Elle a plus à perdre qu’à gagner car le très grand public, pour elle, c’est nouveau. »

En clair, si Léa Salamé a conquis une large partie des téléspectateurs grâce à son ton franc et sa liberté d’expression, l’exercice du 20 Heures est différent : codifié, contraint, et soumis à une forte attente de neutralité et de sobriété.

Un style singulier face à un exercice contraint

C’est là que réside, selon Pujadas, le véritable défi. Léa Salamé s’est imposée comme une journaliste qui « sort des clous », apportant une touche personnelle et parfois déstabilisante à ses interviews. Or, le 20 Heures est un cadre strict, où l’information brute prime sur le commentaire, et où chaque mot, chaque intonation, peut avoir un écho national.

« Sa force, à ce jour, c’est sa personnalité qui sort des clous. Or, il va falloir qu’elle rentre dans l’exercice contraint du 20 Heures. »

Cette remarque sonne comme un avertissement bienveillant : si Léa Salamé veut réussir ce pari, il lui faudra trouver un équilibre subtil entre sa marque de fabrique et les codes institutionnels du JT.

Pujadas, un témoin privilégié du poste

David Pujadas sait de quoi il parle. Écarté du 20 Heures en 2017, après seize années passées à ce poste, il garde pourtant un souvenir ému de cette période. Loin de toute amertume, il confie avoir ressenti « de la gratitude » pour ces années extraordinaires, marquées par des événements majeurs, des éditions spéciales historiques et une immersion quotidienne au cœur de l’actualité.

« J’ai réalisé tout ce qui m’avait été donné. Et puis, le soutien de la rédaction et l’hommage du dernier journal, je ne les oublierai jamais. »

Ce regard rétrospectif donne encore plus de poids à ses conseils adressés à Léa Salamé. Car si le poste offre une exposition inégalée, il implique aussi une discipline et une pression quotidienne que peu de journalistes peuvent imaginer avant d’y être confrontés.

Une attente médiatique intense

À quelques jours de la rentrée, l’arrivée de Léa Salamé au 20 Heures suscite une curiosité immense, tant dans les rédactions que chez le public. France Télévisions parie sur son profil atypique pour apporter un souffle nouveau à ce rendez-vous incontournable.

La question centrale est désormais claire : peut-on conserver une liberté de ton dans un format aussi codifié que le JT de référence ? Les paris sont ouverts, et la réponse ne tardera pas à venir, car l’audience jugera très vite si cette alchimie fonctionne.

Un changement de cap révélateur

Ce tournant dans la carrière de Léa Salamé illustre aussi l’évolution du paysage médiatique français. Dans un contexte de méfiance croissante vis-à-vis des médias traditionnels, les chaînes cherchent à réinventer la manière de présenter l’information. Miser sur une figure connue pour son franc-parler, son aisance dans le débat et sa proximité avec le public peut être une stratégie payante pour regagner la confiance des téléspectateurs.

Cependant, cette mutation comporte des risques : trop de liberté pourrait froisser les puristes du JT, tandis qu’un style trop lissé pourrait décevoir ceux qui apprécient chez Salamé sa capacité à sortir du cadre.

Un défi qui dépasse la télévision

En réalité, la nomination de Léa Salamé au 20 Heures dépasse le seul enjeu télévisuel. Dans une « période chaotique », pour reprendre les mots de Delphine Ernotte, marquée par les tensions internationales, les crises politiques et sociales, et la multiplication des sources d’information en ligne, le rôle du présentateur du JT devient presque symbolique : il incarne la voix de l’actualité, celle qui fait le lien entre les événements du monde et les foyers.

En confiant ce rôle à une journaliste au parcours singulier — née à Beyrouth, arrivée en France à l’âge de 5 ans, passée par la radio et la télévision, à la croisée de plusieurs cultures — France Télévisions envoie un message : celui d’un JT qui veut refléter la diversité et la complexité de la société.

Le compte à rebours est lancé

À dix jours du grand saut, Léa Salamé se prépare à entrer dans un costume médiatique qui a façonné des figures comme Bruno Masure, Élise Lucet ou David Pujadas. Les prochains mois diront si elle parvient à imposer sa marque tout en respectant les codes, à séduire le grand public sans perdre ceux qui la suivent depuis longtemps.

Une chose est sûre : l’intérêt est à son comble. Les téléspectateurs, les journalistes et même les anciens titulaires du poste attendent ce moment avec impatience. Et comme le souligne Pujadas, ce défi ne laisse aucune place à l’improvisation.

Le 25 août 2025, à 20 heures précises, Léa Salamé apparaîtra à l’écran pour ouvrir son premier JT. Ce soir-là, elle ne devra pas seulement présenter les nouvelles du jour : elle devra aussi convaincre qu’elle est à sa place, dans ce fauteuil où se joue, chaque soir, un morceau de l’histoire médiatique française.