Depuis plus de trente ans, Aurore mène un combat acharné pour être reconnue comme la fille d’Yves Montand, immense star du cinéma et de la chanson française.
Née en 1975 de sa mère Anne, elle apprend dès la maternelle qu’elle, comme tous les enfants, a un père. Mais chez elle, ce père reste une énigme. Ce n’est que plus tard qu’Anne lui confie qu’il s’agirait d’Yves Montand.
Au fil de l’enfance, Anne tente à plusieurs reprises de provoquer une rencontre entre sa fille et le célèbre artiste. Simone Signoret, l’épouse de Montand, se montre bienveillante, mais l’acteur refuse obstinément.
À six ans, un rare coup de téléphone laisse espérer à Aurore une rencontre avec son père. Elle se rend au rendez-vous accompagnée de sa baby-sitter, mais le moment vire au drame : après un bref échange de regards, Montand, interrogé sur l’identité de l’enfant, déclare froidement :
« Ce n’est rien du tout ». Ce rejet marque profondément la fillette, qui avoue avoir, ce jour-là, ressenti pour la première fois l’envie de mourir.
Les années passent. À treize ans, alors qu’elle tente d’oublier cet homme, Aurore voit Montand s’afficher dans la presse, exprimant sa joie d’être père pour la première fois à 68 ans.
Pour elle, c’est un second coup de poignard. Sa mère engage alors une procédure judiciaire afin d’obtenir une reconnaissance officielle.
En 1994, la justice tranche en sa faveur, s’appuyant sur des témoignages, des éléments factuels et le refus répété de Montand de se soumettre à un test ADN. Cette victoire est vécue comme une libération : enfin, elle porte légalement le nom de son père.
Mais le répit est de courte durée. Après la mort d’Yves Montand, en 1996, Carole Amiel, sa compagne, et Catherine Allégret, sa belle-fille, contestent la décision et engagent un nouvel appel.
Elles affirment qu’aucune relation n’a jamais existé entre Anne et Montand, allant jusqu’à qualifier la mère d’Aurore d’affabulatrice.
La justice accepte leur requête, ouvrant la voie à l’exhumation du corps de Montand pour une expertise ADN, non pas à la demande d’Aurore, mais à celle de ses opposantes, bien que l’opinion publique ait souvent cru le contraire.
Avant cette exhumation, un test ADN réalisé avec un membre de la famille Montand – le fils de sa sœur – conclut à 99,9 % qu’Aurore n’est pas biologiquement la fille de l’artiste.
Malgré ce résultat, la procédure se poursuit, jusqu’à la décision finale de la justice confirmant l’absence de lien de filiation.
Aujourd’hui, Aurore garde en mémoire ces décennies de lutte, marquées par l’espoir, la douleur et la désillusion. Plus qu’une bataille juridique, ce fut un combat intime pour son identité et sa dignité, face à un refus qui a marqué à jamais son histoire personnelle.
L’affaire autour de la filiation présumée entre Aurore et Yves Montand a marqué les esprits pendant des décennies, tant par son intensité médiatique que par la douleur intime qu’elle a engendrée.
Dans ce long combat judiciaire, la mère d’Aurore et Carole ont toujours voulu aller jusqu’au bout, convaincues de la véracité de leurs affirmations.
Face à elles, la famille de Montand, tout en reconnaissant la détresse humaine de la jeune femme, s’est appuyée sur les conclusions scientifiques et génétiques qui ont finalement exclu toute paternité biologique.
Les débats ont été nourris par la complexité de la situation. Yves Montand, de son vivant, avait refusé de se soumettre à un test ADN, ce qui, à l’époque, jouait souvent en défaveur du présumé père dans les jugements.
Après sa mort, l’exhumation de son corps permit d’effectuer des analyses irréfutables, concluant à l’absence totale de lien biologique.
Pourtant, pour Aurore, élevée toute sa vie dans la conviction intime que Montand était son père, ces résultats ne pouvaient effacer les certitudes fondées sur ses souvenirs, le récit de sa mère et une série d’événements troublants.
Elle affirme avoir subi, avec sa famille, de fortes pressions destinées à la décourager : menaces envers des témoins prestigieux comme Claude Sautet ou Henri Colpi, faux télégrammes annulant des rendez-vous officiels, et même l’intervention d’un garde du corps pour les protéger.
Pour elle, ces manœuvres prouvent qu’il y avait un enjeu considérable à ce que la vérité qu’elle défendait ne soit pas reconnue. Elle ne comprend pas pourquoi tant d’efforts auraient été déployés pour la faire renoncer si ses allégations étaient infondées.
Du côté de la famille Montand, on reconnaît la sincérité et la douleur d’Aurore, tout en soulignant que la justice et la science ont tranché. Juridiquement, il n’existe plus de doute : les tests ADN ont exclu la paternité, et il n’y a pas d’héritage en jeu pour elle.
L’un des interlocuteurs souligne d’ailleurs qu’il n’a jamais nourri d’animosité envers elle, mais regrette l’acharnement qu’il attribue plutôt à sa mère. Il admet aussi que cette affaire a été douloureuse pour tout le monde, et que la véritable victime reste Aurore, qui a dû faire face à un verdict contraire à ses attentes après plus de vingt ans de convictions intimes.
Aurore, de son côté, explique avoir mené un combat intérieur depuis l’enfance, marqué par l’absence totale de figure paternelle. Elle assure que sa mère n’a eu, à l’époque de sa conception, aucune relation avec un autre homme que Montand. Pour elle, il n’y a « zéro doute ». Les épreuves traversées, les tentatives d’intimidation et le soutien de certains témoins l’ont confortée dans cette certitude.
Aujourd’hui, malgré la page judiciaire tournée, la plaie émotionnelle reste vive. L’affaire Montand illustre à quel point la quête de vérité en matière de filiation peut se heurter aux limites entre science, mémoire et conviction personnelle, laissant derrière elle des cicatrices que ni les verdicts ni le temps ne parviennent à refermer complètement.